vendredi 2 mars 2012

Suicide à La Poste: une ultime lettre confie l''"anxiété professionnelle"

Suicide à La Poste: une ultime lettre confie l''"anxiété professionnelle"


Un cadre de La Poste de 28 ans s'est tué mercredi midi en sautant du dernier étage de La Poste République à Rennes, en plein centre-ville et devant des dizaines de personnes, a appris sur place un correspondant de l'AFP.


Jérémy Buan, le jeune cadre supérieur de la Poste qui s'est jeté mercredi du haut de la poste centrale de Rennes a laissé une lettre de désespoir où il dit son "anxiété professionnelle" et son incapacité à vivre dans un "tel contexte opprimant", a déclaré sa compagne vendredi.

"Mon travail ne semble pas apprécié, je suis mis en cause dans mes activités (...) cela a engendré un manque de confiance terrible avec une anxiété permanente. Je préfère ne pas vivre dans un tel contexte opprimant", écrit-il dans cette lettre datée du jour de son suicide.

"J'ai tout pour être heureux, une femme aimante, une fille adorable... mais toute cette anxiété professionnelle a pris le pas sur ma vie privée", poursuit le message que le jeune père de famille a laissé chez lui.

Parfois au bord des larmes, Elodie Briand, sa compagne, a tenu à rencontrer la presse pour lire des extraits de cette lettre et contredire les responsables de la Poste qui parlent de "geste incompréhensible".

"Je fais cette démarche pour que ça ne reproduise plus, parce que d'autres ont été mis au placard comme lui", a dit la jeune femme, dans les locaux de la CFDT à Rennes.

"La Poste ce n'est pas le goulag, c'est clair, mais il y a des situations de souffrance", a souligné Yohann Ménard, un délégué CFDT La Poste, en appelant l'entreprise, en pleine mutation, à "ne pas se voiler la face" après ce "drame du travail".

"On respecte le geste qu'il a fait, il y a de vraies raisons, il faut y travailler et crier qu'il y a des choses qui ne vont pas bien", a ajouté le secrétaire général de l'UD-CFDT 35, Patrice Forgeau qui voit en ce suicide "un acte militant".

Elodie Briand préfère parler d'un "acte de désespoir". A 28 ans, son compagnon avait connu une ascension professionnelle fulgurante: "il avait beaucoup d'ambition, il voulait réussir" mais "sa hiérarchie l'enfonçait et le rabaissait en permanence" et "il se sentait bon à rien", a-t-elle affirmé.

Trois enquêtes ont été ouvertes, par la police judiciaire, l'inspection du travail et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).

La direction du courrier Haute-Bretagne "mettra tout en oeuvre pour que ces enquêtes puissent aboutir au plus tôt et dans les meilleures conditions", affirme un communiqué qui dit "comprendre l'émotion et la douleur de la famille" et exprime "son soutien à l'ensemble des postiers touchés".

Recruté comme simple facteur en 2003 à Rennes, Jérémy Buan avait été promu cadre supérieur après un concours interne en 2009, puis envoyé dans les Côtes d'Armor pour deux postes d'encadrement, selon la Poste.

Il avait demandé un rapprochement familial après la naissance de fille, en octobre, et de retour à Rennes, avait été affecté à un poste "d'un grade inférieur au sien", selon la CFDT.

A la direction du courrier Haute-Bretagne, on confirme qu'il "occupait un poste de niveau inférieur au sien mais avait conservé son grade et sa rémunération". "Ce poste lui avait été donné de manière à répondre favorablement à sa demande de rapprochement géographique car il n'y en avait pas d'autre disponible", selon la même source.

En hommage à leur collègue, les syndicats appellent à un rassemblement lundi à 12h00 sur les lieux du drame. Sur le plan de la procédure, la CFDT et la CGT demandent que l'accident de travail soit retenu.

( Source : Le nouvel observateur - Créé le 02-03-2012 à 17h53 -)

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